SpiritualitéHomosexualité et protestantisme , entre tradition et ouverture

Homosexualité et protestantisme , entre tradition et ouverture

Le mariage pour tous est devenu un thème qui concerne toutes les strates de la société. Les Eglises protestantes sont elles aussi sollicitées sur la question de la bénédiction des couples de même sexe. Toutes n’y répondent pas de la même manière. Quelles sont les grandes lignes de fracture entre Eglise réformée et évangéliste, entre Suisse alémanique et romande ? Qu’attendent les jeunes homosexuel-les de l’Institution ?
Existe-t-il une théologie qui remet en question les normes identitaires ? Le cinéaste romand Lionel Baier évoque sa propre expérience en tant qu’homosexuel et fils de pasteur. Des paroles vivantes qui interrogent la capacité d’une société à inclure ou non l’ensemble de ses minorités.

Les Eglises suisses divisées

La bénédiction pour les couples du même sexe et la consécration d’une personne homosexuelle laissent apparaître des positions différentes entre Eglises réformées et évangéliques. Les Alémaniques se sont ouverts beaucoup plus tôt à la question que les Romands. Le point sur la situation.

L’homosexualité, en tant que fait social et culturel incontournable, a poussé les différentes Eglises protestantes en Suisse à se positionner à la fois sur la question générale de la relation homosexuelle, mais également sur des problématiques concrètes comme la possibilité d’une bénédiction pour les couples du même sexe au sein des Eglises ou la consécration d’une personne homosexuelle. Les prises de position, extrêmement variées, laissent toutefois percevoir deux grandes lignes de démarcation : d’une part, entre les Eglises dites réformées, et celles dites évangéliques ; et, d’autre part, entre les cantons romands et les cantons alémaniques.

Relation différente à la Bible

En ce qui concerne les lignes des Eglises réformées et évangéliques, on peut constater que les premières prônent une position plutôt ouverte et accueillante à l’égard des homosexuels tandis que les secondes adoptent une attitude plus conservatrice voire homophobe. Cette différence s’explique avant tout par une relation différente au texte biblique et aux passages (peu nombreux) qui traitent de l’homosexualité, que ce soit dans l’Ancien Testament (Lévitique, par exemple) ou le Nouveau Testament (épîtres pauliniennes). Les Eglises réformées, influencées par l’exégèse moderne, ont développé une approche de distance critique à l’égard de textes condamnant a priori l’homosexualité. La lecture plus littérale faite par les Eglises évangéliques les pousse au contraire à condamner l’homosexualité, perçue comme un péché voire une maladie et jugée comme une pratique incompatible avec la foi chrétienne. Certaines Eglises évangéliques suisses vont jusqu’à proposer des programmes de « thérapie » ou de «conversion » afin de pousser les homosexuels à se tourner vers l’hétérosexualité.

Si les Eglises réformées adoptent, dans l’ensemble, une attitude relativement ouverte à l’égard des homosexuels, de grandes différences transparaissent d’un canton à l’autre, et de manière plus générale entre Romands et Alémaniques. Les Eglises alémaniques ont en effet été les premières à proposer des bénédictions pour les couples du même sexe, parfois avant même l’existence du PACS ou du partenariat enregistré au niveau civil. C’est le cas par exemple à Berne-Jura, où le synode a accepté la possibilité d’une bénédiction dès 1999. D’autres cantons comme l’Argovie, Lucerne ou les Grisons ont également choisi de proposer des bénédictions depuis plusieurs années maintenant. Il est également possible, dans certains cantons alémaniques, pour une personne homosexuelle d’habiter dans la cure avec sa ou son partenaire

Moratoire

A l’inverse, les cantons romands ont, dans leur majorité, plus de mal à mettre en oeuvre des actions concrètes en faveur des couples du même sexe. Aucune bénédiction nuptiale n’est aujourd’hui proposée à Genève ou à Neuchâtel, et il semble que la question ne soit pas à l’ordre du jour (voir encadré). Toutefois, on a vu à la fin de 2012 se décider au sein de l’Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) une proposition de bénédiction pour couples du même sexe. Cette décision synodale a toutefois causé de grands remous au sein du canton, et des paroisses vaudoises, principalement évangéliques, se sont insurgées contre cette décision et réclament depuis lors un moratoire.

Comme le souligne Pierre Bühler, professeur de théologie systématique à l’Université de Zurich : « Sous l’influence de centres ecclésiaux alternatifs, mais aussi d’avancées en Allemagne et en Scandinavie, les réformés de Suisse alémanique se sont ouverts beaucoup plus tôt à la question de l’homosexualité, tandis que les Eglises réformées romandes partagent sur beaucoup de points la résistance qui caractérise la culture latine. »
L’EERV est la dixième Eglise cantonale (et la première en Suisse romande) à avoir accepté le principe d’un rite pour couples du même sexe. Pour rappel, dans le canton de Berne, qui pratique ce genre de rite depuis plusieurs années, l’Eglise célèbre quatre ou cinq liturgies par an.

Matthieu Mégevand
source:vpge.ch

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